ça occupe

Je n’ai pas écrit depuis des siècles. Il me semble des jours. J’aime bien écrire mais j’ai été trop prise. Enfin pas vraiment, mais c’est pour avoir quelque chose à dire. J’avais des choses à faire. Tu sais, dans la vie réelle, de dehors. Celle qui pue et fait trop de bruit. Qui te souffle dans les oreilles de l’air froid de l’hiver. Celle qui te demande de faire des choses pénibles. Celle qui te parle sans cesse de tout ce qui ne t’intéresse pas.

La vraie vie qu’ils disent. Ils aiment bien dire ça, pour avoir l’air de s’y connaitre en vraie vie. Comme si la notre était différente, fausse. Il n’y a pas de fausse vie. Mais pour eux, la vraie vie se vit à l’extérieur, avec des gens, du bruit et des paroles. Des rires et des odeurs de parfum. Des assiettes pleines de choses que personne n’a vraiment envie de manger, et de la mauvaise bière. La vraie vie voyons ! Celle que tu devrais avoir. Ils savent mieux que toi. Toujours.

Tout ça pour dire que j’étais prise par ma fausse vie à faire semblant de participer à la vraie vie des autres. J’ai creusé des plaques de linoléum pour m’occuper les mains. C’est sympa.

Des fois, pour m’occuper, parce qu’il faut s’occuper vois-tu, j’essaye de regarder les dents de mon chat. Ca me prend bien 10 secondes de ma journée, c’est déjà pas mal. Le reste du temps, je m’occupe à essayer de m’occuper et je fais des jeux de mots.

Ca occupe.

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Je ne sais pas sur quoi écrire

Je ne sais pas sur quoi écrire, ça m’énerve parce que j’ai l’impression de gâcher mon temps et perdre le NaNo. Je ne sais pas sur quoi écrire. Je n’arrive plus à inventer de nouvelles histoires. Je suis peut-être trop fatiguée. Je ressasse, je tourne en rond dans ma tête. J’ai vraiment envie d’écrire mais je ne trouve rien sur quoi écrire. C’est un sentiment horrible de ne pas savoir quoi écrire. Écrire, écrire, écrire. Si seulement j’y arrivais encore. J’ai l’impression que je n’y arriverai plus jamais. J’aimerais écrire beaucoup plus. Je n’ai pas d’idée. Je n’ai plus d’idée. J’écris beaucoup sans idée à mes amis, à internet. Mais j’aimerais écrire autrement. Ça m’ennuie au plus haut point de ne pas savoir quoi écrire. Je ne sais pas pourquoi ça me touche autant.

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Quelques fois seule.

J’ai peur. J’ai peur des gens. J’ai peur de vivre. J’ai peur de mourir. J’ai peur d’être seule entourée de gens. J’ai peur de me perdre. J’ai peur de ne pas savoir quoi faire. J’ai peur de survivre. J’ai peur d’être abandonnée. J’ai peur d’abandonner celleux que j’aime. J’ai peur d’aimer des gens. J’ai peur de les haïr. J’ai peur d’être aimée. J’ai peur d’être détestée. J’ai peur de faire ce que j’aime. J’ai peur d’être forcée à faire ce que je n’aime pas faire. J’ai peur d’écrire. J’ai peur de mon corps. J’ai peur que mon corps ne suive pas mon esprit. J’ai peur de mon esprit. J’ai peur de ne plus réussir à penser. J’ai peur de ne pas réussir à m’arrêter de penser. J’ai peur de la vie. J’ai peur de comprendre le monde. J’ai peur du monde. J’ai peur de ne plus réussir à voir. J’ai peur d’écrire. J’ai peur de ne plus réussir à faire les choses. J’ai peur du vide. J’ai peur du désordre. J’ai peur de l’ordre. J’ai peur d’être loin de chez moi. J’ai peur d’être chez moi. J’ai peur de disparaître. J’ai peur qu’on ne me voit pas. J’ai peur qu’on me voit. J’ai peur d’oublier. J’ai peur de ne pas me souvenir. J’ai peur de la douleur. J’ai peur de ne plus rien ressentir.

J’aimerais bien qu’on me laisse tranquille à essayer de ne plus survivre pour enfin réussir à vivre une vie qui me plait. Laissez moi survivre comme je l’entends, je n’ai pas besoin qu’on me donne des conseils pour vivre ma vie. C’est déjà suffisamment compliqué de vivre dans ce monde incompréhensible et effrayant. Tout va trop vite, tout fait trop de bruit. Je veux juste marcher lentement en échappant au brouhaha, quelques fois seule, quelques fois accompagnée. Tranquillement.

Je n’ai pas envie de comprendre ce monde, il est trop bruyant, trop terrifiant. Je n’ai pas envie d’en faire partie, je suis bien dans mon monde à moi. Tranquillement. Quelques fois seule, quelques fois accompagnée.

Laissez moi tranquille, je me gère aussi bien que possible. Je survis avec moi même depuis assez longtemps, je sais ce que je fais. Arrêtez de faire semblant d’en avoir quelque chose à faire en me disant quoi faire. C’est déjà suffisamment compliqué comme ça de survivre et de s’occuper de soi.

Laissez moi survivre. Ca va, je gère.

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Les autres fois.

Je vomis les mots comme ce trop plein de nourriture qui sort quelques fois par erreur. L’écriture est comme un aliment. La photographie n’a rien à voir là dedans. La nourriture est complexe. Elle est ma pire ennemie et ma plus grande alliée. Elle remplie une partie de mon vide interne, la plus grande partie. Mon estomac appelle. Je le soigne en ingurgitant tout ce que j’ai sous la main et qui est plus ou moins comestible. Puis mon estomac me hante et me dis que je ne dois pas tout ingurgiter comme ça. Alors j’attends mon prochain vide. Et je le laisse me ronger de l’intérieur avec ses grognements sourds qui sortent de mon ventre quelquefois lorsque j’attends trop avant de ré-ingurgiter. Si on attend encore un peu, les grognements cessent, et la faim s’apaise toute seule. Comme si le corps avait trouvé un recoin interne plein de nourriture et l’avait englouti. Alors, par l’écriture, je régurgite ce que mon corps a englouti tout seul, sans moi. Quelquefois ça ne donne rien, parce que ces fois-là mon corps n’a pas assez mangé sans moi. Les autres fois.

[05-10-12]

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Ce constat énervant.

Ce constat que tu fais tous les ans à la même époque. Un corps vieillit, un peu comme une chute lente et interminable où minablement tu t’écraseras à la fin. Alors en attendant ce point final tu contemples tout ce qui entoure ta chute, tu essayes de distinguer les choses, tu essayes de te distinguer de tous ces autres qui comme toi chutent, plus ou moins à ton niveau, plus ou moins à ta vitesse. Il y en a toujours une partie qui chute un temps à tes cotés et puis d’un coup il semble que sa chute s’arrête avant la tienne, parfois même bien avant que tu ne puisses seulement distinguer le fond, la fin de ta chute. Alors tu regardes un peu vers le haut en le cherchant et tout ce que tu vois c’est tous ces autres qui eux aussi chutent au dessus de ta tête. Il y en a qui essayent de s’agripper sur les bords que tu contemples en tombant. Ceux là espèrent arrêter la chute, ou au moins la ralentir un moment. Ils sont au final comme un morceau de suie accroché sur la paroi de la cheminée, ils vont finir par tomber bien plus vite qu’ils ne le pensent, et en bas la collision est toujours la même, plus ou moins violente, plus ou moins espérée.
Tous les ans à la même époque tu passes devant un chiffre, toujours différent qui te prévient que tu te rapproches inévitablement du bas et en même temps te re-situe, comme les chiffres dans les cages d’escalier, comme pour te rappeler que tu n’as gravi que trois étages et qu’il t’en reste encore autant.

[24-10-2011]

Ω

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